Grands enjeux du " Corporate Governance " et spécificité française

François Jeulin

" Pour que l’on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que par disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir " a écrit Montesquieu au dix-huitième siècle. Même si par là il visait les institutions publiques, on pourrait appliquer cette citation au concept de corporate governance. La définition la plus simple que l’on puisse donner de ce principe est qu’il s’agit de l’organisation des relations dirigeants - actionnaires au sein d’une société. L’arrivée en force sur la place de Paris des grands investisseurs anglo-saxons (plus de 30% de la capitalisation), chez qui ce mode d’organisation de l’entreprise est la référence, et qui ont tendance a vouloir imposer leurs méthodes, conduit inévitablement à s’interroger sur ce type d’organisation.

Quels sont donc les enjeux du corporate governance ? Cette notion étrangère, comme l’indique la terminologie anglo-saxonne généralement employée, a-t-elle son pendant en France et y a-t-il une spécificité française en la matière ?

La notion d’enjeu, telle qu’elle est définie dans le dictionnaire Larousse, désigne ce qui est en jeu dans une activité, une entreprise, c’est à dire ce que l’on peut perdre ou gagner. Pour bien en mesurer les enjeux, on analysera dans une première partie les objectifs du corporate governance (c’est à dire ce qu’on peut gagner) et la mise en œuvre pratique de mesures destinées à atteindre ces objectifs, telles qu’elles ont eu lieu chez les instigateurs du corporate governance. L’analyse du cas français dans un deuxième temps permettra à la fois d’en dégager les spécificités et les risques inhérents au corporate governance (donc ce que l’on peut perdre).
 
 

I. Le corporate governance : objectifs et mise en œuvre

Pour analyser le corporate governance il est important de commencer par dégager les objectifs de cette organisation des relations entre les actionnaires et les dirigeants, car cette réforme est venue des besoins concrets des actionnaires et des dirigeants. En partant de cette base, nous verrons comment ces objectifs se sont traduits de manière concrète par des règles et un schéma d’organisation.

A. Les objectifs et principes du corporate governance
Au début des années 80 ont eu lieu de graves turbulences. D’un coté, de nombreuses affaires de paiement illicite aux Etats Unis, dans l’ignorance du conseil d’administration et parfois même de la tête de la société, ont secoué les grandes entreprises américaines. Or l’illégalité aux Etats Unis peut coûter très cher : des centaines de millions de dollars. Une plus grande transparence au sein de l’entreprise était donc requise, pour éviter que ce ne soient les actionnaires qui soient lésés.

D’autre part, les directeurs de société ont étés pris dans la tourmente des OPA. Leurs devoirs ne sont pas faciles à déterminer et toute violation d’un devoir peut entraîner des pénalités se chiffrant en millions de dollars portant cette fois, non pas sur la société mais sur les directeurs eux-mêmes. Leur comportement sera apprécié après coup, par des tribunaux dont la jurisprudence est mouvante. Un arrêt de la cour suprême du Delaware a bien montré la situation : " à l’heure actuelle, quand un dirigeant doit prendre une décision, quelle que soit la décision, il y a toutes les chances pour qu’il soit attaqué en justice d’un côté ou de l’autre ". La cour en question condamnera les directeurs à un paiement de cent millions de dollars de dommages et intérêts. Pour la sécurité des dirigeants, une définition de leur rôle et une codification de leur action semblait de plus en plus nécessaire.

De plus, la concurrence des entreprises japonaises et allemandes, considérées comme mieux gérées et plus efficace se faisait cruellement sentir. La gestion traditionnelle des entreprises américaines se devait donc d’être revue dans le but de les tourner vers une plus grande efficacité, une plus grande capacité à créer de la valeur.

Ces trois défis (encadrement de la responsabilité des dirigeants, transparence et plus grande création de valeur) représentent les grands objectifs du corporate governance et ont conduit à l’élaboration de six grands principes, traçant les grandes lignes du corporate governance.

Le premier principe, tel qu’il est défini par l’influent fond de retraite des fonctionnaires californiens, CalPERS, est le fait de devoir rendre compte (" accountability "). C’est un devoir envers les actionnaires. La création de richesse pour l’actionnaire sur le long terme doit être un facteur prédominant. Le conseil d’administration et les dirigeants doivent être prêts à répondre aux questions des actionnaires sur la situation et les performances de l’entreprise et à expliquer comment les décisions clés sont prises. De plus la responsabilité des dirigeants et des administrateurs sera meilleure s’il existe un contrôle des activités de gestion.

Le deuxième principe est la transparence. Les actionnaires doivent disposer d’un libre accès à une information claire et exacte. Cela doit passer par une standardisation des normes comptables et un contrôle interne accru.

Un troisième principe consiste dans l’équité de traitement des actionnaires, y compris les actionnaires minoritaires et étrangers. En particulier les sociétés ne doivent pas prendre de décisions qui désavantageraient les intérêts des actionnaires minoritaires.

Le quatrième principe concerne les méthodes de vote. Celles-ci doivent être claires et concises. Les propositions doivent être accompagnées des informations suffisantes pour que les actionnaires puissent participer.

Un cinquième principe énonce que tous les marchés financiers devraient développer un code de bonne conduite permettant aux dirigeants de s’autoréguler et de définir précisément leurs relations avec les actionnaires.

Enfin le sixième principe insiste sur la stratégie à long terme dont le fondement est la valorisation de l’investissement réalisé par les actionnaires. Les actionnaires devraient encourager les dirigeants et les actionnaires à avoir une vision stratégique à long terme, qui sont les plus rémunérateurs.

On ne peut pas mesurer les enjeux du corporate governance uniquement par ses objectifs. Le corporate governance se caractérise aussi par sa mise en œuvre pratique. Il convient donc d’étudier les mesures concrètes prises aux Etats Unis, qui caractérisent le corporate governance. L’étude du système américain s’impose car les Etats Unis disposent à la fois de l’avance des pionniers et de la force que représentent leurs énormes fonds de pension qui s’investissent à l’étranger et qui tendent à imposer ce modèle aux entreprises dans lesquelles ils prennent des participations. Le corporate governance est avant tout anglo-saxon (les Anglais ayant suivi le mouvement)

B. Le corporate governance dans l’application de ses principes
Il est tout d’abord important de constater que les réformes qu’induisent les grands principes du corporate governance n’ont pas nécessité aux Etats Unis une modification profonde du droit. C’est à dire qu’il y a eu une modification de la structure du pouvoir au sein des entreprises par la pratique. Ce sont des organismes tels que l’American Law Institute, la Securities Exchange Commission (S.E.C.) qui ont, en collaboration avec la CalPERS, proposé les changements de structure de la direction des entreprises. Ceux-ci ont été adoptés car ils correspondaient aux attentes des dirigeants et des actionnaires. Les règles, sans être inscrites dans la loi, sont respectées par les dirigeants pour éviter d’être reconnus comme responsables lors d’une action en justice. Elles sont aussi respectées par les entreprises, sous la pression des actionnaires (en particulier les investisseurs institutionnels).

La première idée est de bien distinguer ceux qui gèrent la société, ceux qui en ont la responsabilité quotidienne, et le conseil d’administration. Le conseil, dans le corporate governance, a la responsabilité suprême de la vie de la société (pas la responsabilité quotidienne). C’est à lui de choisir les membres du management, de les évaluer, de décider de leur rémunération, de les remplacer. Le conseil doit également surveiller la marche des affaires, revoir les projets, revoir les actions que l’on a prises ou que l’on va prendre, veiller à la bonne tenue de la comptabilité. Le conseil prend donc une place centrale : il devient l’organe responsable de la société.

Chaque membre du conseil a un droit individuel d’inspection de tous les documents et de tous les locaux de la société et de sa filiale. Un pouvoir d’enquête sur la société est donné aux membres du conseil vraiment indépendants (c’est à dire ceux qui n’ont pas de liens familiaux, commerciaux ou financiers avec les membres du management). Ceux-ci peuvent collectivement, à la majorité, soumettre un problème de la société à un juriste, un comptable, ou un expert, et ceci aux frais de la société. Le conseil, par ses membres indépendants, possède dont un véritable pouvoir d’enquête sur le management.

Pour que le conseil puisse remplir ses fonctions, devenues quasi permanentes, il doit se doter de trois comités. Le plus important est le comité d’audit. Il est chargé du contrôle du management en revoyant périodiquement les procédures de production des documents financiers, les contrôles internes de la société et l’indépendance de ses commissaires aux comptes. Il doit être composé d’au moins trois membres , dont aucun n’est ou n’a été employé de la société et dont une majorité doit être complètement indépendante du management (au sens précisé supra). Ce comité est en quelque sorte le délégué du conseil dans son pouvoir de surveillance.

Sont aussi recommandés deux autres comités. Un premier chargé de présenter, sur des fondements objectifs, des recommandations sur la composition du conseil, ce qui permet d’éviter que les membres du conseil doivent tout au management (qui souvent " suggère " à l’assemblée générale...). Un deuxième comité est chargé de proposer les rémunérations que doivent recevoir les membres du conseil et ceux du management. Le but est bien sûr d’éviter des excès quant aux rémunérations versées.

Le schéma ainsi proposé, qui correspond au corporate governance, conduit bien, conformément aux objectifs à renforcer le contrôle des actionnaires sur la société (par le biais du conseil d’administration, devenu un véritable organe de contrôle, ainsi que les comités) et à clarifier les responsabilités du management. Est-ce que le schéma français de la société anonyme répond à ces critères de corporate governance ? Peut-on améliorer le fonctionnement de nos sociétés ?
 
 

II. Etude du cas français et limites du corporate governance

A. La France : un décalage entre la pratique et la loi ?
En France, la loi (24 juillet 1966) et la jurisprudence ont hiérarchisé la répartition des pouvoirs entre assemblée générale, conseil d’administration et président du conseil d’administration. L’assemblée est souveraine et nomme l’exécutif (le conseil d’administration) et lui délègue les pouvoirs de gestion. C’est l’assemblée aussi qui autorise les opérations lourdes concernant la vie de la société. En pratique, le pouvoir est délégué au conseil. Le conseil apparaît donc comme le véritable organe de direction de la société. Le président, à la fois président du conseil d’administration et de la direction, a sous sa responsabilité la direction effective de la société. L’assemblée nomme et contrôle les administrateurs, qui eux-mêmes nomment et contrôlent le président. On a donc un système s’approchent de l’idéal du corporate governance.

Cependant, dans la pratique, bien souvent le PDG dispose d’un pouvoir quasi monarchique. Il est fréquent de voir un président désigner les membres de son conseil d’administration. En effet, fréquemment, le " futur président " est approché par la direction, puis par les actionnaires qui accepterons ses exigences afin d’obtenir son concours. Le contrôle du président par les administrateurs est alors plus délicat. La pratique a instauré une organisation monarchique du pouvoir dans l’entreprise. Non seulement le président concentre une grande partie des pouvoirs, mais les autres organes ne semblent pas à même de faire contrepoids.

Le conseil d’administration est censé former le contrepoids aux pouvoirs du président. Mais le droit français est ambigu sur les pouvoirs du conseil, attribuant au conseil et au président les mêmes pouvoirs d’ " agir en toutes circonstances au nom de la société ". Deux reproches sont généralement adressés aux conseils d’administration. Tout d’abord leur passivité face au président et donc l’échec dans leur mission de contrôle de la gestion courante et de prise des décisions stratégiques. Cette passivité s’explique à la fois par l’influence dominatrice du président et le fait que celui-ci, de par sa fonction, a un meilleur accès à l’information sur la société. L’administrateur ne dispose pas d’assez de pouvoirs individuels face au président : il ne peut que faire inscrire son désaccord au procès verbal. Malgré la jurisprudence qui a imposé au président de faire en sorte que les administrateurs soient suffisamment informés (arrêt Cointreau), ceux-ci dépendent trop étroitement du président pour obtenir l’information (par exemple le rapport des commissaires aux comptes passe au préalable par le président). Le deuxième reproche fait au conseil d’administration est sa trop grande complaisance à l’égard du président. Le problème soulevé est la trop grande consanguinité des administrateurs : nombre d’entre eux sont président de " leur " société et administrateurs ailleurs.

Les commissaires aux comptes rencontrent le même problème que le conseil d’administration : le plus souvent ils ne peuvent s’opposer efficacement au président, car ils courent le risque d’être renvoyés par la suite. C’est tout le problème des auditeurs payés par l’entreprise qui devraient rester indépendants.

Il existe bien en France, pour éviter ces problèmes, la société anonyme à directoire et conseil de surveillance. Cette nouvelle structure sociale de la loi du 24 juillet 1966, importée du droit allemand, devait apporter une meilleure gestion par le contrôle, le pouvoir de direction étant confié au directoire, le pouvoir de contrôle au conseil de surveillance. Pourtant seules 3% des entreprises l’utilisent et de nombreuses ont fait machine arrière. En fait, dans la pratique, les rôles ne sont pas clairs : qui est responsable de la stratégie, qui tranche en cas de conflit ? Ce schéma de direction a souvent conduit à des blocages ou à un immobilisme.

Donc en France, si la loi semble s’approcher de l’esprit du corporate governance, dans la pratique, le pouvoir n’est pas vraiment partagé. Mais, comme on peut le constater, le pas à faire n’est pas très grand. A la lumière des problèmes rencontrés on peut déduire les modifications nécessaires pour que la direction française de nos entreprises satisfasse aux critères de corporate governance : faire en sorte que les actionnaires soient mieux informés, qu’il y ait une information extérieure indépendante au profit des administrateurs, qu’on impose un minimum d’administrateurs non associés à la gestion, encourager la participation d’administrateurs indépendants, interdire les nouvelles participations croisées aux conseils (et faire en sorte que les actuelles se décroisent progressivement), instituer les trois comités internes du corporate governance et responsabiliser les administrateurs.

Ces mesures, ne nécessitent pas une modification fondamentale de la loi et s’inscrivent, de fait, dans l’esprit de la loi de 1966. En effet l’article 93 limite au tiers du conseil d’administration le nombre des administrateurs liés par un contrat de travail. De plus, la constitution de comités spécialisés (comités des comptes, comités des rémunérations, comités stratégiques) est expressément prévue par l’article 90 du décret d’application de la loi de 1966. Finalement, ce qui est nécessaire, c’est une modification des comportements dans les faits. Le sénateur Marini l’a bien compris, ne suggérant que de légères modifications de la loi en ce sens : la suppression des dispositions subordonnant la qualité d’administrateur à celle d’actionnaire, rendant ainsi possible la nomination d’administrateurs indépendants ; la possibilité de déléguer certaines compétences du conseil à des comités (par les statuts de l’entreprise) ; la levée du secret professionnel du commissaire aux comptes à l’égard des membres du comité d’audit.

Il en résulte que la mise en place d’un corporate governance à la française aurait tout intérêt à se faire, à l’instar des Etats Unis ou de la Grande Bretagne (avec le code Cadbury), non pas par une contrainte légale, mais par une codification privée. Cela permettrait plus de souplesse et d’adaptivité des mesures à des entreprises de nature différente, ainsi qu’une évolutivité plus grande au cours du temps. Cependant l’étude de la spécificité française en matière de gestion des sociétés anonymes, ne nous permet elle pas de voir les limites du corporate governance, et donc ce que ce mode de gestion de l’entreprise peut faire perdre par rapport à celui plus traditionnel qui a cours en France ?

B. Les limites du corporate governance
Ce qui est en jeu dans le corporate governance c’est l’exercice du pouvoir au sein de l’entreprise. Le choix d’un contrôle démocratique ne doit pas avoir comme conséquences d’handicaper l’exercice de l’autorité et supprimer toute hiérarchie. La direction opérationnelle ne doit pas être paralysée dans ses actions, dans ses choix stratégiques et tactiques. Dans un environnement de concurrence internationale, où l’hésitation peut coûter très cher, une direction fortement personnalisée peut s’avérer un atout. Un trop fort contrôle sur le pouvoir suprême pourrait le rendre inefficace et finalement nuire à l’efficacité de la gestion de l’entreprise, ce qui est le contraire du but recherché.

L’efficacité de l’entreprise risque aussi d’être remise en cause par la nomination d’administrateurs indépendants. Non seulement les critères d’indépendance sont difficiles à définir, mais surtout, cela risque de conduire à nommer des administrateurs désintéressés et irresponsables. Cela n’a rien de démocratique non plus : la société ne sera plus gérée par des administrateurs librement élus en leur sein par les actionnaires. Ceux-ci risquent de se révéler de terribles technocrates.

La créations de comités spécialisés au sein de l’entreprise pose elle aussi des problèmes de démocratie : le pouvoir sera en fait exercé par des organes dont tous les membres ne sont pas élus par les actionnaires. De plus en cas de faute de gestion, les actionnaires risquent de souffrir d’une dilution des responsabilités, les comités et les administrateurs se rejetant mutuellement la faute. L’avantage de la centralisation des pouvoirs est justement de faciliter la recherche des responsables.

Le corporate governance soulève un autre problème : celui de la confidentialité. Les affaires nécessitent souvent un certain secret. Or un secret est d’autant mieux gardé qu’il est partagé par peu de personnes. De ce point de vue, les comités d’audit au pouvoir très large peuvent être donner sujet à inquiétude. Lors de la discussion d’un gros contrat le détail des prix, de la marge du contrat pourront être connus de tous les membres du comité, y compris les administrateurs représentants des minoritaires et ceux indépendants. Cela pose le problème des garanties de la confidentialité. De même, en multipliant le nombre de personnes ayant accès aux données stratégiques de l’entreprise, on court le risque de multiplier les initiés, au sens juridique du mot, ainsi que les opérations boursières illégales.

Donc, le corporate governance comporte aussi des risques : ce qui est en jeu c’est l’efficacité des entreprises, ainsi que la démocratie d’exercice du pouvoir en leur sein. La doctrine du corporate governance risque, à l’inverse de ses objectifs, de renforcer la technocratie au lieu de la démocratie au sein de l’entreprise. Elle nécessite aussi de trouver un équilibre entre transparence et efficacité, si l’on veut éviter trop de fuites, nuisibles à la stratégie de l’entreprise et la bonne application du droit sur les délits d’initiés.
 
 

Donc, la doctrine du corporate governance, née aux Etats Unis, a pour objectif une meilleure définition du pouvoir au sein de l’entreprise, dans le but d’améliorer l’efficacité de la gestion de l’entreprise et de protéger les actionnaires, ainsi que les dirigeants. Son succès auprès des investisseurs institutionnels américains laisse à penser que ceux-ci voudront une gestion similaire dans les entreprises étrangères dans lesquelles ils investissent. La crédibilité de la place de Paris est donc en jeu. On peut constater que les grands principes du corporate governance s’approchent assez bien de l’esprit de la loi française sur les sociétés du 24 juillet 1966. Vouloir les mettre en œuvre ne demanderait donc pas de modifications très importantes de notre loi. Cependant la spécificité française existe bel et bien dans la pratique où la démocratie et la transparence ne sont pas toujours de mise. Une corporate governance à la française exigerait avant tout un changement dans les comportements, qui pourrait s’effectuer par une réglementation privée (par la COB ou le CNPF, qui tous deux ont publié déjà de nombreuses recommandations), plutôt que par voie législative. Dans le corporate governance est donc aussi en jeu, indirectement, une autre façon de faire du droit, qui laisse une plus grande part à la réglementation privée. Enfin, la spécificité française comporte elle aussi ses avantages qui permettent de souligner les faiblesses de la doctrine de corporate governance : le risque d’inefficacité opérationnelle, de technocratisation de l’entreprise et de fuite d’information.

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